Extrait du livre « un combattant de l’ombre dans les bagnes nazis » p144-145-146-147-148 de Béatrice Mounir et Laurent Guillet. Editions association Pierre Régent

29 Avril 1944 :

L’Atterrissage forcé des aviateurs américains à Allaire

Le 29 Avril 1944, deux avions américains revenaient d’une mission sur l’Allemagne et regagnaient l’ Angleterre. Mais l’un des deux avait été touché et son réservoir fuyait, il ne pouvait donc plus traverser la Manche. Les deux aviateurs par contact radio ont alors décidé d’atterrir en parachute après avoir lancé leurs avions en piqué.

L’un des avions est tombé dans un champ situé dans l’actuelle rue des genêts.

Marcel BARON se souvient: « nous étions à l’école dans le manoir de Coueslay*. nous avons entendu un bruit sourd, le maître, l’abbé Le lièvre est sorti, nous l’avons suivi  » arri­vés au milieu de la prairie, près de l ‘actuel lieu de vie le maître nous a dit « regardez le parachute qui descend » . Peu après le parachu­tiste est tombé sur la charpente de la maison Mainguet qui était en construction; la charpente ayant cédé il s’est retrouvé dans la cave.

Emile MAINGUET a précisé qu’il ne s’agit pas de l’actuelle maison Mainguet, rue de Redon mais d’une autre maison située 2 mavant celle-ci, mais il avait fallu la détruire car elle était trop près de la rue. Il a encore en mémoire l’arrivée des allemands sur les lieux: « Les gens avaient fait un trou vers chez Yves Sébillet pour enterrer le parachute, les curieux continuant à se rassembler de plus en plus nombreux sur les lieux, les gendarmes ont ramassé le parachute. Ils ont fait un rapport à la kommandantur de Vannes qui a transmis à celle de Redon,. ce sont les allemands basés à Redon qui sont venus. Un de mes frères, né en 36, a même été mis en joue: « où est l’homme ? » Les allemands étaient nerveux ».

* L’école s’était déplacée à Coueslay car les classes avaient été réquisitionnées par les allemands. Bien que ces derniers aient quitté Allaire depuis trois semaines, la classe continuait au manoir de Coueslay.

Marcel BARON a vu sur les lieux de chute de l’avion « trois personnes se faire secouer, les allemands ont cru que le parachutiste était tombé avec l’avion enfoui en terre,. d’ailleurs ils étaient venus avec quatre cercueils.

Pendant ce temps, le parachutiste avait été pris en charge par le fils de l’instituteur Maurice RENAUDEAU. Ils étaient partis à travers les prairies en direction des Championnais, puis aidés de Paul AYOUL,  ils sont arrivés à la Béraye en Caden chez Monsieur et madame MOQUET. Ce parachustiste s’appelait Norman D. HERS BERGER et était originaire de Poolesville dans le Maryland.

L’autre aviateur était tombé dans un champ près du Vau-Jouan – Alexandrine CRUAUD se souvient: « c’était la saison de sarcler les semis de betteraves et de choux. Ce jour là notre cousine Bernadette était venue pour nous apporter son aide. Les hommes : Alexandre mon frère, Louis et Léon, les commis, étaient occupés soit à étendre le fumier, soit à passer le rouleau dans les champs. Notre attention avait été attirée par des bruits d’avions qui paraissaient venir dans notre direction, à basse altitude. Tout à coup, nous avons entendu un gros « boum » puis un 2ème plus près de  nous. Les hommes qui travaillaient au champ avaient très bien vu l’avion, foncer en piqué. Ils se hâtèrent d’aller sur les lieux de l’accident. Beaucoup arrivaient également des environs. L’aviateur qui s’était éjecté de l’appareil était tombé avec son parachute sur un sapin à environ 150 m de son avion. Celui-ci avait le moteur enfoncé en terre. L’aviateur s’était foulé la cheville en tombant et avait du mal à se dégager de son parachute. Il faisait signe par gestes, aux badauds qui l’entouraient, de s’éloigner car il y avait danger d’explosion de l’appareil ; heureusement, rien ne se produisit. Il fit aussi comprendre aux personnes présentes, qu’elles pou vaient découper le parachute et se servir. C’était une aubaine par ces temps de pénuries.

L’aviateur avait une légère blessure à la tête. Alexandre et Louis le conduisirent à la ferme de la Ville Denée chez Louis Mathurin. Là, sa plaie fut désinfectée à l’alcool de cidre.

 Un peu étourdi par sa chute, il demandait du whissky , les gens de la maison lui offrirent ce qu’ils avaient c’est-à-dire de l’eau de vie de cidre qu’il apprécia beaucoup. Monfrère et Louis le conduisirent ensuite, en le soutenant, chacun d’un côté dans un champ de seigle. Les fils Moureaux du gros chêne lui apportèrent à boire. Pendant ce temps, les allemands sillonnaient toutes les routes avec leurs motos et leurs camionnettes, à la recherche des aviateurs. Ils arrivèrent 40 minutes après leur chute. Pensant qu’ils étaient morts, ils avaient pris la précaution de prendre 4 cercueils.

 A la tombée de la nuit Alexandre conduisit l’ aviateur au Bot. Nous avions dans le village un couple de parisiens monsieur et madame Georges Lebel: Georges était de la classe 42 donc recherché pour aller travailler en Allemagne, il parlait anglais ce qui nous facilita la tâche pour converser avec l’aviateur. Georges partit à la Belle de Mai en Béganne chercher notre cousin Joseph Coyac qui était engagé dans la résistance, pendant ce temps là nous avons soigné l’aviateur, nous lui avons fait un pansement à la tête et nous avons préparé un bain d’eau salée pour sa cheville. Nous nous sommes tous mis à table pour dîner ; il appréciait tout spécialement les saucisses qu’il mangeait sans pain.

 La journée ayant été dure pour lui, il commençait à s’assoupir à table, nous l’avons donc fait coucher dans la chambre. A 2 heures du matin nous l’avons réveillé et nous lui avons fait boire un bon café. Il s’est mis à parler avec Georges et il nous a décliné son identité : il s’appelait Albert G. Johnson, il avait 22 ans et venait du Minnesota ; il était officier américain en stationnement en Angleterre, dans l’attente du débarquement en France. Il disait que le débarquement allié devrait avoir lieu fin mai ou début juin. A3 heures les hommes sont partis au village de Bled où Joseph Coyac les attendait. il avait préparé une maison pour Albert, les résistants de Béganne lui avaient apporté des vêtements civils mais ils étaient un peu trop justes, vu sa forte corpulence ; ils lui avaient apporté aussi du ravitaillement et des cigarettes. Mon frère Alexandre et Georges Lebel lui portèrent des saucisses qu’il réclamait. Georges conversa avec lui. Albert lui dit que son copain Norman et lui avaient participé à un raid sur une ville allemande près de la frontière française. Le réservoir de l’avion de Norman avait été touché par la D.C.A. allemande et il fuyait ; en plus, ils s’étaient égarés. Ils communiquaient entre eux par radio et comme ils ne voulaient pas se séparer, ils avaient décidé d’atterrir ensemble, en pleine campagne, et c’est pour cela qu’ils avaient ensemble lancé leurs avions, à fond, en piqué pour que le moteur s’enfonce dans la terre. Le dimanche nous avons dit adieu à cet ami tombé du ciel et Paul Ayoul et Georges Lebel l’ont conduit à bicyclette chez monsieur et madame Moquet, à la Béraye en Caden, en ‘renant soin d’éviter la grand route. Là, il retrouva son copain Norman.

Depuis la chute de ces 2 avions, les allemands cherchaient toujours les pilotes. Ils reprochaient au chef de gendarmerie, monsieur Le Corre, de ne pas avoir fait une enquête  sérieuse sur cette affaire ; Ils l’ont même mis en joue dans la cour de la gendarmerie. A la suite de cette histoire, il fut chassé de la gendarmerie ainsi que sa femme et sa fille. Nous les avons accueillis chez nous pendant une semaine. Après le départ des allemands nous leur avons livré notre secret ».

 Les 2 aviateurs sont restés quelques jours à la Béraye puis Raymond CHEMIN les a conduit à la ferme du Plessis chez les frères THEBAULT aux Quenues dans une maison inhabitée appartenant aux parents de Jean-Raymond THEBAULT demeurant à Paris. Ils y restèrent quelques jours puis le jardinier de Monsieur MOQUET les conduisit chez Marie MOQUET, soeur de ce dernier à Langon. Ils y reçurent des soins d’André LIBER, pharmacien à Beslé. Ensuite Marie MOQUET les dirigea vers Tours avec de faux papiers. Pendant tout le trajet ils se firent passer pour des sourds-muets. Arrivés à la frontière espagnole ils devaient embarquer pour l’Angleterre mais ils ont été faits prisonniers et conduits en Allemagne où ils sont restés jusqu’à la fin de la guerre.

Après la guerre, Albert a entretenu une correspondance suivie avec Georges LEBEL pendant environ trois ans et lui a raconté toutes ces péripéties.

 

 

 

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